Mois : juillet 2023

Le journal de juin 2023

une voix, une affiche & du silence

lundi26juin

La première fois qu’il s’est produit à Carcassonne, c’était le 28 juin 2010.

Treize ans plus tard, presque jour pour jour, Bob Dylan est de retour sous les remparts millénaires de la Cité. Il se produit ce soir au Grand Théâtre – devenu Théâtre Jean Deschamps – en ouverture du festival. Il était l’avant-veille au théâtre du Liceu à Barcelone. Il filera demain en direction d’Aix-en-Provence puis Lyon pour deux sets dans le cadre des Nuits de Fourvière avant de terminer en Italie une mini-tournée européenne dans le prolongement du mondial Rough and rowdy ways tour.

Comme d’habitude, Bob Dylan arrive sur scène entouré de ses musiciens qui font corps autour de lui. On dirait un clan. Ils demeureront ainsi toute la soirée, en rangs serrés, Dylan donnant le tempo derrière son piano à queue Yamaha dont il joue la plupart du temps debout. La setlist ne varie guère de celle des jours précédents. Ce voyage dans le temps long qui intègre la totalité des titres du dernier album – moins la monumentale Murder most foul – débute par un vieux titre, Watchin’ the river flow. Nous écouterons pendant près de deux heures s’écouler le long fleuve intranquille de la poésie dylanienne accrochée à ses racines populaires. Jusqu’à cet ultime Every grain of sand souligné par un trait d’harmonica venu du fond des caves de Greenwich.

Mais les temps changent et les mots du poète roulent vers des résonances nouvelles. Chaque soir, sur scène, Dylan se réinvente. Et personne ne sait vraiment ce qui se passe, ici. Do you, Master Jones ?

dimanche25juin

Aux élections locales de ce dimanche, le parti d’extrême-droite Alternative pour l’Allemagne (AfD) décroche pour la première fois la direction d’une collectivité territoriale. Cela se passe dans la région de Thuringe. Robert Sesselmann remporte l’élection dans le district de Sonneberg avec 52,8 % face au candidat du parti conservateur. Tous les grands partis – SPD, Verts, FDP – et toute la gauche avaient appelé à faire front commun autour du candidat de la CDU. En vain. « Écrivez l’histoire et votez pour Robert Sesselmann », avait exhorté la présidente nationale de l’AfD dans un spot de campagne.

L’extrême-droite est entrée au Bundestag en 2017. Elle fait désormais jeu égal avec le parti social-démocrate (SPD) du chancelier Olaf Scholz. Partout où la social-démocratie européenne glisse vers un social-libéralisme qui n’a plus rien ou presque de social, les droites extrêmes progressent.

samedi24juin

« Le but de la société est le bonheur commun ». Article premier de la Constitution adoptée le 24 juin 1793.

lundi19juin

L’Humanité de ce matin consacre huit pages à la panthéonisation de Missak et Mélinée Manouchian. L’événement suscite de nombreuses réactions positives dans les milieux de gauche, parmi lesquelles celle du réalisateur Robert Guédiguian qui a consacré un film – L’armée du crime (2009) – à l’épopée de Missak et des FTP-MOI : « Manouchian représente à mes yeux la synthèse de l’espoir communiste, de l’internationalisme et de la jeunesse. Ces combattants tenaient du héros au sens grec du terme. Ils étaient jeunes, beaux, forts, ils écrivaient, chantaient, avaient toutes les qualités intellectuelles et physiques de la jeunesse : ils en avaient aussi l’insoumission, la révolte, la rébellion. (…) Manouchian était le survivant d’un génocide. Et puis, il y a cette histoire d’amour qui le liait à Mélinée, avec cette dernière lettre, sublime. Dire à celle qu’on aime au moment de mourir qu’elle doit se marier et avoir un enfant, c’est d’une grande beauté, de ces mots qui marquent l’histoire de l’humanité ».

dimanche18juin

Missak Manouchian, résistant communiste et révolutionnaire, fusillé le 21 février 1944 à l’âge de 37 ans, entre au Panthéon. Ses cendres et celles de son épouse Mélinée, résistante comme lui, seront transférées dans la crypte du grand temple mémoriel de la République le 21 février 2024.

Rescapé du génocide arménien, réfugié en France en 1925, Missak Manouchian rejoint la résistance communiste en 1943 au sein des FTP-MOI, les Francs-Tireurs Partisans-Main d’Œuvre immigrée. Il est tragiquement célèbre pour figurer parmi ses compagnons sur l’Affiche rouge placardée dans Paris par la propagande nazie et désignant ces résistants comme de dangereux terroristes.

Son groupe a perpétré de nombreux attentats meurtriers contre l’occupant nazi dont l’un des plus marquants fut l’exécution du général Julius Ritter, responsable de la mobilisation de la main-d’œuvre dans l’Europe occupée. On attribue au groupe Manouchian près de trente opérations dans Paris entre le mois d’août et la mi-novembre 1943.

Mélinée, réfugiée arménienne comme Missak, adhère au Parti communiste français en 1934, en même temps que son futur époux. Ils se marient le 22 février 1936 et entrent ensemble dans la clandestinité après le décret du 26 septembre 1939 frappant d’interdiction le PCF. Mélinée suit Missak quand il s’engage dans la lutte armée en 1943. Elle participe aux activités du groupe de transport d’armes et d’agents de liaison au sein duquel elle est chargée du repérage des cibles.

L’affiche qui semblait une tache de sang…

« Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L’affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu’à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants »

se souvient Aragon en 1956 dans Le Roman Inachevé, concluant son poème L’affiche rouge par ces vers éternels :

« Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient le cœur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant. »

Manouchian est le premier résistant « étranger » – et notre frère pourtant – à entrer au Panthéon. Avec lui, c’est toute la résistance étrangère – juifs, arméniens, espagnols, italiens, anciens des brigades internationales… – rassemblée au sein des FTP-MOI qui est honorée. Manouchian est aussi le premier résistant communiste à recevoir le plus solennel hommage de la République. Avec lui, c’est le rôle qu’a joué la résistance communiste dans la lutte contre le nazisme et la libération de la France qui est reconnu.

Deux communistes au Panthéon : une première dans notre histoire mémorielle. Enfin.

vendredi16juin

C’est à Fort Yukon, en Alaska, où elle se trouve en février 2012, neige jusqu’à mi-cuisse, « dos ployé et cou enfoui dans les épaules » que Nastassja Martin forge le projet dont elle fait récit dans son dernier livre, A l’Est des Rêves, qui, écrit-elle, « témoigne d’une folie intellectuelle et d’un voyage impossible ».

Nastassja Martin au-delà d’un « grand pont de glace ».

Tout désir est travaillé par l’urgence et la nécessité. Après avoir mené des investigations en Alaska auprès du peuple Gwich’in, l’anthropologue est saisie d’une évidence : son enquête de terrain ne sera pas terminée tant qu’elle n’aura pas franchi le détroit de Béring pour faire dialoguer les deux rives, « remonter vers les liens des lieux et collectifs avant que la colonisation » – américaine côté Alaska, russe côté Kamtchaka – « ne les brise ». Elle ne pense qu’à ça : aller voir « comment c’était, là-bas », chez les Even, un peuple nomade éleveur de rennes colonisé par les soviétiques. Partir à la rencontre de collectifs autochtones, sédentarisés au temps des kolkhozes mais dont elle est convaincue que certains sont « repartis en forêt pendant ou après l’implosion de l’URSS », vivre selon les règles « d’un ancien monde renaissant de ses cendres pour faire face à une crise ».

Encore faut-il vérifier l’hypothèse et pour cela, poursuivre les recherches au-delà du « grand pont de glace ». Nastassja Martin décide d’obéir au murmure obsessionnel de son for intérieur. En juin 2014, elle est au Kamtchaka, accompagnée de son collègue Charles Stépanoff avec qui elle effectue « un premier terrain exploratoire ». La suite de la lecture s’annonce passionnante.

-o-

J’ignore toujours pourquoi j’ai été comme foudroyé, dès ma première lecture, par l’incipit de Tristes tropiques de Claude Lévi-Strauss et qui ne cesse depuis de me hanter : « Je hais les voyages et les explorateurs ».

Pourquoi des phrases vous suivent-elles comme votre ombre ? Quels frissons intimes stimulent-elles ? Existe-t-il une vie dans les mots qui se puisse toucher ? Les mots sont-ils plus que les mots ?

Si j’en parle ici, c’est parce que Nastassja Martin y fait référence dans son livre A l’Est des Rêves : « Si Lévi-Strauss écrit, en ouverture de Tristes tropiques, qu’il hait les voyages et les explorateurs, je n’ai aucune gêne à dire que, pour ma part, je déteste les tableaux et les schémas »… dont elle s’apprête pourtant à faire usage dans son exposé, de même que Lévi-Strauss doit se résoudre, malgré sa « haine », à faire le récit de ses expéditions.

mercredi14juin

La première ministre se dit prête à discuter « des modalités » d’un titre de séjour pour les étrangers qui s’appliquerait aux secteurs les plus tendus de l’économie en matière de recrutement de personnels. C’est un point du dispositif de régularisation des travailleurs sans papiers qui crispe les Républicains très sourcilleux des politiques migratoires et que le gouvernement pourrait durcir afin d’obtenir un compromis.

Le fond est clair. C’est celui d’une immigration choisie. Malheur à celles et ceux qui ne seraient jugés utiles au redressement industriel de la France, ils retourneraient à leur enfer sans autre forme d’humanité.

mardi13juin

Etang & voie – TGV Paris-Perpignan – mardi 12 juin, 15 h 41.

(Dans le TGV qui, hier, me ramenait de Paris à Perpignan)

C’est toujours la même chose, après une période plus intense qu’à l’ordinaire : il faut reprendre langue.

lundi12juin

Le Monde publie un nouvel article d’Audrey Garric sur le réchauffement climatique. Il s’agit d’un entretien croisé avec la biogéographe sud-africaine Debra Roberts et le climatologue allemand Hans-Otto Pörtner qui coprésident le groupe de travail 2 du GIEC. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat vient de publier une synthèse de huit années de travaux. « L’humanité et la nature sont poussées chaque jour davantage jusqu’à leurs limites par les impacts toujours plus ravageurs et souvent irréversibles du changement climatique d’origine humaine », retient la journaliste en forme de énième alerte. Que nous disent aujourd’hui ces experts ?

« Entre 3,3 et 3,6 milliards d’humains, soit près de la moitié de la population mondiale, vivent dans des zones hautement vulnérables ».

Ces mêmes populations sont « en même temps exposées à d’autres pressions (…) telles que le sous-développement, une grande pauvreté, une mauvaise gouvernance et un manque de financement ».

Mais « si les pauvres et les plus vulnérables subissent le plus durement le changement climatique, en réalité, personne ni aucune région n’est à l’abri de ses effets ».

« De nombreuses zones du monde subissent déjà des chaleurs extrêmes (…) Ces conditions dépassent le plus souvent les limites de l’adaptation humaine et mettent en péril notre survie ».

« Nous poussons maintenant la planète vers un avenir climatique où seule une partie de sa surface sera habitable par les animaux, y compris les humains (…) Notre espèce est l’une des plus vulnérables en raison de la complexité de nos systèmes d’infrastructures, de notre économie et de notre interdépendance mondiale ».

« Nous créons un avenir qui devient profondément injuste et invivable pour un grand nombre de personnes pauvres et vulnérables ».

« Notre espèce manque de vision à long terme, nous ne réagissons qu’à l’immédiat ».

« Je ne vends pas de l’espoir. L’espoir ne met pas un toit au-dessus de votre tête. Il ne vous donne pas d’eau potable. Il ne vous protège pas. Je crois au travail acharné. Le rapport de synthèse du GIEC indique que nous devons réduire nos émissions de 60 % d’ici à 2035. Cette baisse sera prédéterminée par les actions mises en place d’ici à 2025. C’est donc au cours des deux prochaines années qu’il faudra travailler dur ».

dimanche11juin

Guy Goffette à Gérard Noiret : « …la poésie en prose ou en vers reste pour moi la seule écriture essentielle, donc nécessaire… ».

En 1915, Vladimir Maïakovski clôt son poème La flûte des vertèbres sur ces vers :
« Voyez,
je suis rivé au papier
par les clous des mots ».

De clou, il est encore question sous la plume de Jacques Goorma :

« un mot
me cloue

sur le mur impalpable
de ma nuit

quelque part
dans l’inétendu ».

Sources : entretien avec Guy Goffette, sur le site En Attendant Nadeau. Maïakovski, L’amour, la poésie, la révolution, éditions Le Temps des Cerises (traductions Henri Deluy). Jacques Goorma, Tentatives, Les Lieux-Dits éditions.

samedi10juin

« Le poème rend le silence
incandescent »

Jacques Goorma a été entre autres chargé de mission pour la poésie à la ville de Strasbourg et, à ce titre, initiateur des Poétiques de Strasbourg. Il est l’éditeur des œuvres de Saint-Pol Roux chez Rougerie et Gallimard. Dans la collection Jour & Nuit qu’il dirige aux éditions strasbourgeoises Les Lieux Dits, il publie en 2017 ses Tentatives.

Plus qu’un recueil, il s’agit d’une suite – dans le sens musical du terme – de quatre-vingt dix poèmes ou tentatives poétiques, pour rester fidèle au titre du livre.

le mot peut-être…

Tentatives est une suite habitée par le silence tel qu’il « mue dans la parole », « sans forme » et sur lequel « on a jeté ce mot lisse / pour le faire apparaître ».

Avec Jacques Goorma, on n’approche pas le poétique à grand fracas. On le frôle dans l’espoir d’une caresse qui soit le lieu de sa révélation. Cette poésie est minimaliste. Elle essaie d’en dire le moins possible pour ne pas risquer la rupture. C’est une poésie qui retient son souffle ; où les yeux sont « pierres de feu et d’eau » ; où « un regard dénoue / les paroles muettes » ; poésie de « la faille vive » et du recommencement.

« une fois encore
tenter

cette fois
peut-être »

Et cette fois, il arrive qu’elle advienne, lumineuse, comme une épiphanie :

« demander aux mots
de décrire le silence

c’est demander aux nuages
de parler du ciel ».

Dans l’attente douce et patiente d’

« un poème simple
comme un ciel
sans pli ».

vendredi9juin

Marché de la poésie – Place Saint-Sulpice – Paris V – vendredi 9 juin, 16 h 08.

Le Marché de la Poésie se tient comme tous les ans place Saint-Sulpice. Jusqu’à dimanche, les poètes s’assiéront sagement aux tables de leurs éditeurs. Ils se protègeront comme ils peuvent de la chaleur étouffante. Ils regarderont, curieux et amusés, déambuler les passants. Les uns comme les autres peineront à engager une conversation qui viendra ou ne viendra pas. Il y aura de la timidité dans l’air humide. De la pudeur. Des rires. Des accolades. Observant ce manège, son côté enfantin, je me dis que si ce lieu n’existait pas, il manquerait au pays du poème les mots qui le désignent et lui donnent sa respiration.

jeudi8juin

Aujourd’hui, anniversaire de la mort de Robert Desnos au camp de concentration de Theresienstadt.

dimanche4juin

C’est « une tache lépreuse au milieu du paysage bocager », une « échappée de paysage », « une étendue confuse de taillis maigres » au creux de laquelle se niche « une de ces villas de prétentieuse et médiocre apparence ».

Au temps de l’occupation allemande, le narrateur la frôlait du regard, cette « maison trop haute pour sa largeur », lors du trajet qu’il effectuait « presque chaque semaine » en autocar entre son lieu de résidence et la ville voisine où il enseignait au lycée, jusqu’au jour où l’idée lui vint de « la visiter de plus près ».

Les éditions José Corti publient La Maison, un inédit de Julien Gracq. C’est un texte d’une trentaine de pages. On apprend dans la postface que l’auteur l’a paginé avec soin. Qu’il a inscrit son titre sur la couverture. Tout atteste, dans la forme, qu’il le destinait à la publication. Mais pour une raison inconnue, le manuscrit est resté au fond d’un tiroir.

La Maison est le récit d’une fascination. Pour un lieu d’abord. Son caractère énigmatique qui se dit dans la langue du mystère dont Gracq a le secret. Et pour une présence enfin, « immédiate et toute proche », qui s’écrit, elle, dans la langue du désir.

La Maison, texte inédit de Julien Gracq, vient de paraître aux éditions José Corti

La scène est la suivante : le narrateur explore discrètement les entours de la demeure quand il devine « aux restes du plus intriguant des déjeuners sur l’herbe qu’on pût voir », le signe d’une présence. « Je demeurai, il me semble, plusieurs minutes parfaitement immobile. L’éclaircie avait passé ; une pluie fine et silencieuse noyait la fin de journée déjà sombre – la tache blanche et élargie de la nappe fantomatique au milieu de sa clairière de brume aiguisait le froid grelottant. Une extraordinaire suggestion d’abandon et de tristesse, au-delà des mots, au-delà de tout réconfort, me serrait le cœur devant cette cène vide, cette table servie pour la nuit d’hiver au milieu des mousses pourries et des bois noirs – un pressentiment confus et obsédant de voyage sans retour, d’adieu transi et lugubre, de fraction du pain dernière et condamnée ».

Et bientôt, de la maison en ruine, une voix s’élève.

16-30 juin 2023 / Barque, sphères & carnet

Carnet – Caune de l’Arago à Tautavel – Jeudi 29 juin, 10 h 53.

(avant texte)

Ils ont l’art de lire la terre comme un grand livre ouvert sous leurs yeux. Ils doivent tout voir. Passer au tamis chaque millimètre du carré qui leur a été confié. Depuis 1964, des archéologues professionnels et bénévoles se succèdent à la caune de l’Arago à Tautavel où des traces d’occupation humaine avaient été détectés bien avant la découverte, en 1971, du crâne Arago 21 qui fait aujourd’hui la célébrité du lieu. Notre ancêtre, homo heidelbergensis, vivait ici il y a 450 000 ans. C’était un nomade chasseur-cueilleur qui se débattait contre les affres du climat et la sauvagerie des bêtes qui l’entouraient. Grâce aux découvertes des chercheurs, nous le connaissons mieux aujourd’hui. Nous pouvons le suivre dans son quotidien. L’imaginer allant, venant, dans cette plaine baignée par les eaux du Verdouble et la lumière de Méditerranée mais qui, à cette époque lointaine, était recouverte de steppes. Les archéologues ne sont toutefois pas « que » des imaginatifs. Avant d’écouter une intuition murmurer à leur oreille quelque piste de recherche, ils travaillent méthodiquement, avec une rigueur qui ne tolère aucune émotion. Quand un archéologue découvre un reste, qu’il soit humain ou animal, il ne pleure pas. Il ne se laisse pas submerger par la joie immense qui l’envahit. Dans son carnet, il note l’emplacement exact de sa trouvaille, son orientation, il la dessine sur du papier millimétré pour que les générations futures sachent où, quand, comment, ce petit morceau de squelette a été trouvé. Parce que les archéologues vivent un drame dont ils ne parlent pas : ils détruisent l’archive sur laquelle ils travaillent. Un chantier de fouille, ce n’est pas comme un livre dont la page demeure une fois qu’on l’a lue et tournée. La feuille de l’archéologue, c’est le carré de terre qu’il creuse et qui disparaît une fois qu’il l’a exploré. Un jour, plus personne ne fouillera la caune de l’Arago parce que tout aura disparu. Mais le grand livre, lui, pourra toujours être consulté : ce sont les modélisations établies à partir des carnets de notes des fouilleurs, et ce sont les réserves du laboratoire de recherche associé au musée de Tautavel. Elles sont riches aujourd’hui de quelque 400 000 objets retrouvés là-haut, dans la caune, tout au bout d’un chemin escarpé qui, pour le dire avec le poète occitan Claude Marti, a garrigue sur ciel.

jeudi29juin

Tautavel – Vue de la Caune de l’Arago – 11 h 44.
Caune de l’Arago – Tautavel – 11 h 43.

mercredi28juin

Fête du Travailleur Catalan – Bocal du Tech, Argelès-sur-Mer – 15 h 54.

lundi26juin

Luminaire & banc – plage d’Arès – 9 h 36.

dimanche25juin

Sphères – Jetée d’Arès – 21 h 25.
Couchant – Bassin d’Arcachon à Arès – 21 h 30.

samedi24juin

Barque jaune – Port ostréicole – Arès – 9 h 08.
Oiseau sur la branche – Réserve naturelle – Arès – 9 h 44.

vendredi23juin

Grand Crohot – Lège Cap Ferret – 17 h 30.
Jeu de plage – Arès – 21 h 24.
Demeure – Arès – 21 h 37.

mercredi21juin

Chat perché – rue Benjamin Franklin – Perpignan – 21 h 22.

mardi20juin

Terrain & wagon – Bocal du Tech – Argelès-sur-Mer -18 h.
Tracteur communiste – Bocal du Tech – Argelès-sur-Mer – 18 h 08.
Che & Karl – Bocal du Tech – Argelès-sur-Mer – 18 h 10.

lundi19juin

Street art – Rues Pépinière Robin & Antoine Battle – Perpignan – 17 h 34.
Stationnement interdit – rue Vendémiaire – Perpignan – 17 h 42.

vendredi16juin

Chapelle des Saintes Puelles – Tautavel – 11 h 55.
Vigne, chapelle & village – Tautavel – 12 h 04.
Casot – Tautavel – 12 h 05.