Étiquette : Marcelin Pleynet

Ruiner le temps

Le lecteur est assis. Son image réduite à trois doigts d’une main tenant un livre.

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Le matin, ville silencieuse. Seul le chant des oiseaux. Ils chantent le souvenir du printemps. 

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retrouver la moulure des vieilles portes, la feuille d’acanthe, la tresse ourlée, trame invisible des jours, 
se frayer un chemin entre les signes,
lire, relire, peut-être écrire d’une fenêtre entrouverte un jour de vent 

ruiner le temps 

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Sirènes de véhicules d’urgence. Chants morbides enveloppés dans la rumeur. Nous les avions oubliés. Comme l’arrivée du printemps.

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Disnovation.org
The pirate Cinema 2012-2014.
Installation, vidéos en temps réel et en réseau (capture d’écran – transcription en noir et blanc)

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Mardi – Livré aux mots.  
Jeudi – en autarcie. Comme un roman.
Vendredi – Vitale 
18 h – poésie. Le ciel caché sous un manteau de laine.

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« Dans ces textes (Paysages en deux, 1963), le propos de Pleynet consiste à nous faire percevoir le monde, non comme un spectacle déjà constitué que la poésie viendrait seulement redoubler, mais comme un univers de significations multiples en cours de composition. En conséquence, la poésie ne doit plus imiter le vécu, représenter une réalité bien connue qui se déroule sous nos yeux. Elle doit être expérience à vivre de cette multiplicité des signes dans laquelle nous évoluons et qui ne peut être appréhendée, rendue que de manière fragmentaire et contradictoire. (…)

Il s’agit d’inventer une écriture poétique qui, enfin, soit accordée à notre expérience active et véritable du sens – expérience qui est à la fois celle de l’individu dans le monde, de l’écrivain face au texte qu’il compose, du lecteur devant la page qu’il découvre ». 

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Derrière avril noté au crayon le souvenir d’un bord de mer 

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Ne jamais tenir pour acquise la phrase qui vient de s’écrire. Gommer, biffer, retoucher, réécrire. La rue se vide. L’heure est propice. Plus légers que l’air, les mots volent. La poésie n’imite ni ne représente. Elle traverse les langues. Elle est expérience de signes
comme
par temps d’orage, grondements au loin, quelques gouttes avant le retour du soleil

L’égarement. L’oubli
Et pas un mot sur la disparition du ciel  

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A quoi demain ressembleront nos visages ?

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Sources – Sur la poésie de Marcelin Pleynet : Philippe Forest, Histoire de Tel Quel, Seuil Fiction & Cie., page 149.
Le collectif Disnovation.org a été fondé à Paris en 2012. « Travaillant autour de la désobéissance technologique, il produit, avec The Pirate Cinema, une visualisation immersive des transferts de données. Les interceptant en temps réel, l’installation exhibe ainsi des bribes des produits de consommation visuelle les plus populaires ». L’installation The Pirate Cinema a été présentée une première fois en France en 2017 au centre Pompidou dans le cadre du festival Hors Pistes puis au printemps 2020 au musée du jeu de Paume dans l’exposition Le supermarché des images. 

23 mars 2020-10 janvier 2021