Le style de Stendhal : son allure équestre. Souvent au galop, plus rarement au pas. Stendhal doit son tempo enlevé au fait qu’il dictait plus qu’il n’écrivait de sa main. Son écriture utilise toutes les ressources du parler. On la sent en pleine possession de son oralité. Lisez Stendhal à haute voix, la phrase y gagne.
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Il est arrivé à Balzac de lui reprocher cette manière d’écrire qui, galopante, cède parfois à l’approximation dans sa construction syntaxique. Stendhal corrige. Le plus souvent il suit les indications de Balzac mais sans jamais renoncer au rythme de sa phrase.
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Dans La chartreuse de Parme, les monologues intérieurs se succèdent. Les personnages se parlent à eux-mêmes. Le lecteur connaît leurs intentions. Elles forment la charpente du récit dont la trame est le reflet.
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... les embrasures des portes, les gonds qui grincent…
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Stendhal est habité par le souci du détail. La duchesse de Sanseverina au comte Morsi : « … ces détails m’intéressent fort, donnez-les moi tous, faites-moi bien comprendre les plus petites circonstances ».
Il aime peindre les sentiments. Toujours la duchesse : « … voilà un mot qui peint bien l’état de mon cœur ; si ce n’est la vérité c’est au moins tout ce que j’en vois ».
Encore elle : « Dans cette soirée décisive, je n’avais pas besoin de son esprit ; il fallait seulement qu’il écrivît sous ma dictée, il n’avait qu’à écrire ce mot que j’avais obtenu par mon caractère… »
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Stendhal écrit les passions, les lieux, les paysages, les objets, les sentiments, les couleurs, les plis des vêtements, les embrasures des portes, les gonds qui grincent, les tapis que l’on soulève, les coussins sur lesquels on repose sa tête…
Stendhal est un entomologiste. Il épingle.
Ecrivant sous la dictée de ce qu’il voit du monde, il est tout entier dans la somme des images que son écriture métamorphose. Il coule de source.
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Source : Stendhal, La chartreuse de Parme, édition Bibliothèque de la Pléiade.
8 avril 2020-11 mars 2021