Phrag/mes

« Nous courons dans l’incendie du monde » – René Nelli


Suite alpestre (3/11) | Monts, merveilles et ravages

Le Mont-Blanc vu de la croix de Stata. Jeudi 7 août, 13 h 01.

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Jeudi 7 août | Un balcon

Fiche technique – Levés 7 h 30. Départ 9 h en direction du col des Aravis. Au départ du col, vers 9 h 30, l’itinéraire du jour nous conduira jusqu’au Chalet du curé (1645 m). Comme le ciel est d’un bleu immaculé et que nous avons du temps devant nous, nous décidons de prolonger jusqu’à la croix de Stata (1782 m). Dénivelé : 584 m. Distance totale parcourue : 16,7 km.

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La balade est remarquable par la vue panoramique quasi permanente qu’elle offre sur le massif du Mont-Blanc : le Mont lui-même, si majestueux dans son manteau neigeux, flanqué à notre gauche par les l’Aiguille du Midi et les Grandes Jorasses. Nous avons marché sur un balcon. Alentour, l’activité agricole est intense. Beaucoup de chalets d’alpages et de fermes où s’élabore le Reblochon fermier, la spécialité des Aravis. Vaches à lait, donc, dans les pâturages mais aussi des bovins élevés pour la viande de boucherie. Nous arrivons à la Croix de Stata. Panorama époustouflant sur le massif du Mont-Blanc. A nos pieds : Flumet, Chaucisse et le vallon de Chaucisse. Déjeuner sur place. Au menu du jour : tranches de rosbif froid achetées la veille à la boucherie de Saint-Jean-de-Sixt, tome fermière également achetée la veille à la ferme de Paccot sur le plateau des Glières. Le retour s’effectue par le même itinéraire jusqu’au Chalet du Curé puis bifurcation par la croix des Frêtes et retour au col aux environs de 16 h.

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Noms des lieux-dits traversés – La Grande Montagne, la Lorette, la Tête, Psamo, Plan Rebord, le Chalet du Curé, la Frête, les Florièts, les Stapssets, les Mouilles, la Croix de Stata, Croix des Frêtes, les Planchaux.

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La porte des Aravis vue du col éponyme. 10 h 06.

Un géant magnifique – Le col des Aravis est dominé par une imposante montagne, l’Adroit des Aravis, véritable mur de pierre percé par une trouée, la Porte des Aravis. Une légende est attachée à cette brèche, équivalent alpin de la Brèche de Roland dans les Pyrénées. Et c’est ici Rabelais – ô surprise ! – que nous croisons. La légende dit en effet que Gargantua en personne serait la cause de cet accident de terrain. En traversant les Alpes, le géant aurait trébuché sur la montagne et, sous le coup de la colère, aurait d’un coup de pied rageur arraché un énorme bloc qui voltigea jusque dans le Beaufortain pour en devenir l’un des symboles sous le nom de Pierra Menta.

L’origine gargantuesque de la Porte des Aravis trouve en réalité sa source dans un pastiche. Le texte racontant l’affaire a été écrit, à la manière de Rabelais, par un certain Samivel (nom de plume de Paul Gayet-Tancrède) et publié en 1956 dans son livre La Montagne aux éditions Larousse. Peu me chaut ! J’adore les légendes et je me plais à imaginer Gargantua franchissant la chaîne des Aravis sans égard pour ses crêtes. Ainsi aurons-nous cheminé tout le jour dans les pas du géant magnifique.

Un détail cependant et qui n’en est peut-être pas un : dans le massif du Beaufortain, la Pierra Menta est voisine de la pointe de… Gargan ! Avec les noms, allez savoir.

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Un moment dans la journée. C’est l’heure de la traite, celle où le troupeau quitte son alpage pour rejoindre la ferme. Les vaches connaissent le chemin. Avec bonhomie, elles se frayent un passage au milieu des touristes.

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« Les mots ne mentent pas » – Dans sa chanson Lo Païs que Vol Viure enregistrée en 1973 en pleine révolte des vignerons du Midi, Claude Marti chante les Corbières : « Es lo ciprès quilhat / La Corbièra salada / Es lo vilatge mort / La terra abandonada ». (C’est le cyprès dressé / la Corbière salée / C’est le village mort / La terre abandonnée). Avec sa terre bleue comme une orange, Paul Eluard a raison : « Les mots ne mentent pas ».

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Cartes postales

Chalet d’alpage au col des Aravis. 9 h 39.
Envers des Aravis. L’Etale vue du Chalet du Curé. 10 h 54.
Composition minérale (détail de l’Etale). 10 h 58.
Sente montant vers la Croix des Frêtes vue du Chalet du Curé. 18 h 59.
En revenant de la croix de Stata, l’Aiguille verte. 13 h 31.
Chalet et Mont-Blanc. 14 h 03.
Le massif du Mont-Blanc vu de la croix des Frêtes. 14 h 57.
Le chemin vers la croix de Stata vu de la croix des Frêtes. 14 h 59.
Et toujours le Mont-Blanc, vu du point culminant de la croix des Frêtes, avant la redescente vers le col. 15 h 07.
Le col des Aravis au pied de l’Adroit des Aravis. 15 h 27.

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Source : pour la légende rabelaisienne, site internet de la société géologique de France.